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A mon prince disparu
A mon prince disparu
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16 juin 2010

Jours de semaine

Mardi 15 juin 2010

6h30. Lever habituel. Passage par la salle de bain, etc. , etc,.Je suis contente car pour la première fois depuis des mois je ne suis pas en retard sur mon timing. Je vais déposer notre fille à la garderie du matin à  7h45 au lieu de 8h. Après tout, je paie un forfait pour la garderie. Je quitte notre domicile heureuse de ne pas avoir à courir ce matin.

7h45. Nous arrivons devant l'école. Un papa furieux nous informe que l'école est fermée. Explications : les parents qui déposent leur(s) enfant(s) à la garderie du matin ne passent pas par l'entrée principale. Or c'est à cet endroit qu'une pancarte annonçant une grève a été placardée. Seuls les parents arrivant à 8h20 ou allant chercher leur(s) enfant(s) à 16h30 ont pu la voir. Grâce à Dieu, la maman de Baptiste, le premier amoureux de notre fille, me propose de la garder jusqu'à l'ouverture de l'école.

8h30. Je suis dans les transports. Coup de blues soudain. Je pense à toi, à nous deux, à notre vie. J'étais heureuse. Je le savais parce que c'est avec toi que j'ai découvert ce que c'est qu'être aimée et respectée. Tu me regardais comme on regarde quelqu'un de bien. C'était la première fois que je vivais cela. J'étais fière d'être ta femme et que mon ventre porte ton enfant. Je le suis toujours... Je replonge dans mon livre car je ne veux pas que mon maquillage coule avant d'arriver sur mon lieu de travail. Je n'arrive pas à me concentrer sur ce que je lis alors je pense à toutes les choses que j'ai à faire.

12h00. J'étais très fatiguée face à mon ordinateur mais j'ai quand même réussi à travailler. Je décide d'aller sur le marché durant ma pause déjeuner. Je sais que je pourrais y trouver des vêtements pas trop chers. J'opte pour une tunique bleue ciel à 23 euros. Je me moque un peu de mon achat, j'ai juste besoin de m'acheter quelque chose pour moi. Je vais ensuite acheter des fruits bio chez Les nouveaux Robinson. En chemin, ma tristesse revient. Pourquoi m'as-tu abandonnée? Ce n'était pas de ta faute. Tu nous aimais toutes les deux. Je le voyais et tout le monde me l'a dit. Tu étais très fier d'être père. Tu adorais notre fille. C'est pour cela que tu as voulu partir. Tu ne voulais pas être un boulet pour nous. Tu as fui ta souffrance mais aussi l'idée que tu te faisais de nous à savoir que nous serions mieux sans toi. Mieux sans toi? Comment as-tu pu penser une chose pareille? Les larmes coulent sur mes joues. J'essuie mon nez et j'invective Dieu et son commandement de nous aimer les uns les autres. Pourquoi nous demander de nous aimer si c'est pour nous séparer? «Dieu est Amour». Ah oui? Alors pourquoi quand deux êtres en souffrance se rencontrent les séparent-ils? Tu es heureux mon prince, j'en suis heureuse pour toi, tu l'as bien mérité. Ta souffrance est enfin terminée. Mais la mienne?Combien de temps encore vais-je devoir porter cette Croix de plus en plus lourde? Pourquoi n'avons-nous pas disparu ensemble tous les trois en même temps? A force de penser, ma tristesse devient colère contre Dieu. C'est la pauvre caissière du magasin qui va en faire les frais. J'explose parce qu'elle me demande de lui montrer mon sac. Je le fais d'habitude spontanément dès que je m'aperçois que le magasin n'a pas de portique antivol. Cette fois, je suis prête à faire un scandale, cela me ferait du bien mais en professionnelle elle ne répond pas à ce que je lui balance. Je quitte la caisse sans un regard sur elle, ni merci, ni au-revoir. Comment fait-elle pour garder son calme? Je ne dois pas être la première débile mentale qu'elle voit. Combien voit-elle de furies par jour? Après la tristesse et la colère, c'est la honte qui m'envahit. Le deuil peut-il tout expliquer, tout excuser?

 

14h05. J'ai mangé au soleil avec ma collègue Fabienne. Je prépare mon thé avec Jennifer. Je me sens mieux. «Reine téléphone, c'est l'école!» Qui m'a appelée? Je ne sais pas. Mon cœur s'accélère quand je prends le combiné. Une des professeurs des écoles non grévistes m'explique. Elle a essayé de m'appeler 8 fois sur  mon portable (Encore une fois, je ne l'ai pas entendu sonner) Les pompiers ont emmené notre puce à l'hôpital de P...Je quitte mon bureau sous le regard gêné de mes collègues. Je respire fort dans les transports et essaie de me concentrer sur le programme à venir. C'est le même scénario que la dernière fois. Je sais que je vais passer la nuit dans cet hôpital. Hormis un lit de camps, le service des urgences ne propose rien aux parents, pas de repas, pas d'affaires de toilette, rien. On arrive en urgence et on doit se débrouiller ensuite. Avant de m'y rendre, je passe donc à la maison. Je prends tout ce dont notre fille et moi aurons besoin. Je décide de prendre la voiture. Je sais que les transports sont longs pour accéder à l'hôpital et que selon l'heure à laquelle nous rentrerons demain, il risque de ne pas y avoir de bus.

15h40. J'appelle les urgences. Notre fille est là, ils m'attendent. Dans la voiture, je ne retrouve plus mon trousseau de clés. J'ai du les oublier sur la porte. Entre temps, quelqu'un a déjà du rentrer pour nous cambrioler. Je viens juste de recevoir le téléviseur...Voyons Reine, calme toi. Si tu es dans la voiture, c'est que tu as pu l'ouvrir. Ce doit être un signe, je ne dois pas prendre la voiture...Je finis par retrouver mes clés sur le siège passager avant. Je branche mon GPS. Il m'envoie des messages bizarres. Bon, si tu ne fonctionnes pas tout de suite, j'y vais en transport. Je dois répéter cette phrase au moins cinq fois avant que mon GPS ne démarre. Mon calvaire ne fait que commencer. Je me fais klaxonner en moins de 5 minutes mais la fautif m'a fait un signe de remerciement, je me fais insulter par un chauffeur routier, prêt à descendre pour venir me frapper, je me  perds et tourne en rond pendant plus d'un quart d'heure, je me ridiculise en essayant à plusieurs reprises de faire une demi tour, je cède en entendant les klaxons qui viennent de part et d'autre de la route et sous le regard éberlué d'une maman qui s'est arrêtée pour regarder le spectacle, je grille un !feu rouge et me décide à prendre les transports. Je remonte chez nous, échange mon tee-shirt trempé de sueur contre un propre et descend attendre le bus. Arrivée à l'hôpital à 18h45. Sans commentaires...


Mercredi 16 juin 2010

15h30. Notre fille a passé son EEG. Mon père vient nous chercher. Et oui...

Sur mon portable, ma directrice prévenue que je ne venais pas travailler ce matin, m'a laissé un message très gentil et compréhensif.

17h00. Mon père est rentré chez lui. Il reviendra ce week-end avec ma mère. Notre puce et moi allons faire une petite promenade. Au loin j'aperçois Martine une des ATSEM de l'école. Nous allons à sa rencontre et je lui donne des nouvelles de notre fille. Martine est étonnée et pour cause : elle faisait partie des grévistes. Je lui parle de notre fille et naturellement la conversation dévie sur nous, sur mon deuil, ma tristesse. A ma grande surprise, elle m'apprend que son mari est décédé il y a 10 ans alors que leur fils était âgé de 9 ans. «Moi aussi, ça a été brutal. Il est mort dans son sommeil à côté de moi, d'une crise cardiaque. Il avait 37 ans. En plus je ne travaillais pas. J'ai du me débrouiller toute seule». Mon cœur se serre quand elle me parle de la dépression de son fils trois ans plus tard, des reproches qu'il lui a fait, «T'aurais pu t'en rendre compte qu'il allait pas bien...T'aurais pu faire quelque chose...» Nous parlons des réactions des autres, «Un de perdu, 10 de retrouvés», de la chance que nous avons d'avoir le soutien de notre belle-famille, de notre sentiment de culpabilité, de Dieu, de notre vision de l'avenir et du monde. Je reste stoïque mais je la vois à plusieurs reprises ravaler ses larmes. 10 ans après, la souffrance est toujours là.

Voilà mon prince comment se déroule ma vie sans toi.

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Commentaires
T
Je l'ai bientôt terminé. Je serais bien intéressée de connaître ton ressenti dessus après, quand tu l'auras lu...<br /> Bien cordialement
T
C'est curieux, j'ai entendu parler de ce livre et je me disais que j'aimerais l'acheter. Ton commentaire va me faire passer à l'action.
T
Bonjour Reine,<br /> <br /> Hier, je me suis offert le dernier livre de : "Frédéric Lenoir" (je ne sais pas si tu le connais, il est Directeur de publication du "Monde des Religions". Il a écrit aussi "rencontre du bouddhisme et de l'occident", le Christ philosophe", "Socrate, Jésus, Bouddha" et autres... .Il écrit très simplement et "raconte" bien, pas du tout un style d'érudit)<br /> <br /> Je ne te connais pas mais dès les premières pages, j'ai pensé à Toi, à ce billet de Toi en lisant les premières pages de ce nouveau bouquin donc : " Comment Jésus est devenu Dieu"<br /> <br /> C'est aux éditions Fayard. Il coûte 19.90 euro
T
J'ai oublié de noter ma nouvelle "adresse" de blog par là d'où je repasserai te voir...<br /> A bientôt
T
Il faut faire attention, Reine, aux petites contrariétés que nous subissons et qui, sans que nous le sachions, "contrôlent" - à notre insu- le déroulement d'une journée. <br /> <br /> Ici, c'était la "contrariété" de trouver l'imprévu sous forme de grève scolaire qui a fait remonter en Puce et Toi, la mauvaise "surprise" du départ de ton prince... comme un ricochet... <br /> <br /> On apprends ensuite à se méfier de toutes ces petites "contrariétés", à les identifier juste au moment où elles arrivent et à les "caler" de façon à ce qu'elles n'empoisonnent pas trop le reste de la journée <br /> <br /> Courage reine, tu as déjà fait un bon bout de chemin de deuil tu sais, tu t'en sors... après c'est vivre qui devient un chemin..<br /> <br /> de tout coeur avec Toi<br /> marie-mnémo an co...
A mon prince disparu
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