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A mon prince disparu
A mon prince disparu
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30 août 2011

Papa !

La nuit dernière. Notre puce est un peu excitée alors elle a l'autorisation de dormir dans notre chambre. Je lui explique que je suis fatiguée et que si je ne suis pas toujours disponible pour elle, c'est parce que je dois aussi m'occuper de choses de «grande personne», que je suis seule à les faire et qu'il y a des moments dans la journée où j'ai besoin de souffler un peu. La question jaillit brusquement «Comment il est mort papa?». C'est la première fois qu'elle me pose la question du comment et non du pourquoi. Embarrassée, je réponds lâchement «On en parlera, mercredi avec M.D». Avec un grand sourire, elle me rétorque:

- Comme ça on lui demandera si papa il a laissé une lettre

- Une lettre?

- Oui, une lettre où il dit «Je suis mort parce que quelqu'un m'a tué»

- Personne ne l'a tué ma chérie

Et là, soudain, je me mets à parler. Je décris la dépression, la fatigue, ton sentiment de ne pas pouvoir t'en sortir, le désespoir, la décision du Dr.L, ton hospitalisation, la décision du Dr W., ton départ de la maison, mon inquiétude, l'inertie de la police, toi dans la forêt, ton sac de médicament, ta mort. Je n'insiste pas sur les détails. J'emploie des mots adaptés à une petite fille de 4 ans et demi. Elle m'écoute attentivement. Je sens que le moment est important pour elle, pour moi, pour nous trois. Au fur et à mesure que je parle, son visage se transforme. Je la vois faire des efforts énormes pour retenir ses larmes qui sont déjà prêtes à sortir.

- Ça va ma puce?

- Papa ! ...Papa!... Papa!...

Un torrent de larmes a jaillit et pendant de longues minutes, elle ne fait que répéter ton nom «Papa!». Je bafouille quelques mots maladroits. Elle hoquète «Mais moi j'aimais bien quand j'allais à la piscine avec lui!». Je la réconforte comme je peux mais je ne peux m'empêcher de penser Enfin! Enfin,elle te pleure. Enfin, elle exprime son chagrin. Enfin, je lui ai dit comment tu es mort. J'attends patiemment que la crise passe. Combien de fois a t-elle répété ton nom? Je n'en sais rien mais je sais que ce qui vient de se passer était inévitable et nécessaire.

Les pleurs de notre fille ont pour un moment brisé la carapace que je me suis construite à travers mon travail, mes lectures, les films que j'ai vu. Face à la douleur de notre fille, j'ai retrouvé la mienne. Presque deux ans après, j'ai beau faire «comme si», je n'ai rien oublié.

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Commentaires
A
C'est bien que tu aies été là pour lui raconter, et bravo pour ta force.
J
quand un enfant pose une question: c'est qu'il peut entendre la réponse...à sa "hauteur" bien sûr<br /> vous avez bien fait, même si c'est douloureux, un pas de plus de fait, vous êtes beaucoup plus forte que vous ne le pensez!
A mon prince disparu
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