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A mon prince disparu
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24 août 2010

Toujours un manque

Hier matin, j'ai pris le train avec une voisine qui habite dans le même bloc d'immeuble que Nounou. As-tu déjà croisé Évelyne sans le savoir? Je sais que vous ne vous êtes jamais parlé. Je connaissais plus de personnes que toi dans notre voisinage. Évelyne m'a avoué (je suis la seule personne à qui elle a confié son secret) qu'elle va se marier en décembre. A 48 ans, elle rayonne comme une jeune première. Sa vie a pourtant été marquée par des évènements terribles.

Évelyne a eu deux enfants «d'un premier lit». Son cadet, a été victime d'un accident domestique alors qu'il devait avoir environ 10 ans. Gravement brûlé sur le visage et le corps, il a subit pendant un an outre des douleurs horribles, plusieurs greffes de peau et a été suivi par un psychologue durant cette période. C'est aujourd'hui un jeune homme d'une vingtaine d'années que je n'ai jamais vu. Évelyne m'a affirmé plusieurs fois que je devrais le reconnaître à son visage défiguré.

Tout à son bonheur, Évelyne m'a confié qu'elle regrettait l'absence de sa mère décédée lorsqu'elle avait 18 ans. «C'est maintenant, à mon âge, quand je vais me marier qu'elle me manque vraiment. Il y a mon père mais j'aurais bien aimé parlé de ça avec elle. J'aurais bien aimé qu'on prépare ça ensemble, et puis même avant j'aurais bien aimé lui poser des questions.»Je lui ai dit que je me posais des questions vis à vis de ta fille. Malgré tous les efforts que nous faisons tous pour combler ton absence, un jour ou l'autre, le manque se fera sentir. Évelyne confirme mes pensées. «Peut-être se sera comme moi, le jour de son mariage, peut-être se sera plus tôt. Tu sais, on ressent toujours un manque...»

Pour ne pas hurler et pour rester aussi anonyme que les autres personnes assises dans le wagon , je me suis dit que notre fille ne serait pas seule. Tu es présent à ses côtés à chaque seconde de sa vie.

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Commentaires
T
Merci Alexandra pour ton message. Je me pose tellement de questions par rapport à ma fille que tu me permets d'avoir un angle de vue. <br /> <br /> Comment va t-elle grandir avec le fait que son papa s'est suicidé? Sans arrêt, je lui répète que son papa l'aimait, que nous l'avons tous les deux désirée très fort. Je ne veux pas qu'elle se sente responsable de la mort de son père, ni qu'elle s'imagine qu'il ne l'aimait pas assez pour continuer à vivre. C'est aussi pour elle que je me bats contre le Dr W.<br /> <br /> Le jour même où on m'a annoncé la mort de mon amoureux, je l'ai dit à notre puce en sachant qu'elle ne comprendrait pas ce qu'est la mort. Je voulais pourtant qu'elle l'entende tout de suite. De toutes les façons, le téléphone sonnait sans arrêt, la maison était soudainement envahie par notre famille et nos amis, je pleurais sans arrêt, son papa qu'elle réclamait ne revenait pas, à quoi bon lui mentir ou lui cacher la vérité? <br /> <br /> Je n'ai pas encore employé les termes de "suicide" ou de "dépression", je le ferai le moment venu, quand ces mots auront un sens pour elle. Je lui avais expliqué que son papa avait été hospitalisé. Du haut de ses trois ans et demi, notre puce sait que son papa est mort d'une maladie. Plus tard, j'essaierai de lui parler de cette maladie qu'on appelle dépression. Je préfère qu'elle apprenne tout cela de ma bouche parce que je me méfie des amis qui vous veulent du bien.<br /> <br /> J'ai créé une "boite" à l'attention de ma fille. Cette boite contient quelques-unes des affaires ayant appartenu à son père et qui parlent de lui: livres, vêtements, petits objets qu'il aimait. J'ai mis aussi dans cette boite, les dernières chaussures qu'il lui a achetées parce qu'il aimait que sa fille soit belle. Cette boite contient aussi les lettres que j'ai reçues de toutes les personnes qui l'ont connu, famille et amis. Beaucoup évoquent des souvenirs qu'ils garderont en eux et parlent de lui comme d'une belle personne. Ma fille aura ainsi une autre vision que la mienne. J'ai même gardé les banderoles des couronnes de fleurs, "A notre professeur", "A notre ami du théâtre". Je lui raconterai comment l'église était bondée et que beaucoup avait quitté leur région pour être présent aux obsèques de son père.<br /> <br /> Ma fille aime à me faire répéter certains souvenirs de notre vie, les rires, les disputes. Je lui raconte les fois où il l'avait grondé et sa fierté d'être papa. Ma seule limite sont nos histoires de couple car cela n'appartient qu'à nous.<br /> <br /> Je sais parfaitement que cela ne remplacera jamais sa présence mais je pense que c'est mieux que rien.
A
J'ai perdu mon père à 2 ans et il ne me manque pas, parce que je ne l'ai pas connu dans le sens où je n'ai aucun souvenir : ni ma mère, ni ma grand-mère n'ont voulu m'en parler... Je n'ai pour toute preuve de son existence qu'une photographie et un article de journal relatant les circonstances de sa mort.<br /> Je pense que le manque se gère (c'est un vilain mot, je sais) : le chagrin se transforme, vous transforme, finit par vous donner (mais, c'est très long) plus de force, de lucidité et de simplicité aussi... Je ne pense plus à ma maman tous les jours, mais ce n'est pas nécessaire, car elle est effectivement avec moi et même en moi dans tout ce qu'elle m'a transmis.<br /> En revanche, l'absence de souvenirs, le vide de la filiation est une interrogation constante qui peut mener au vertige et à l'autodestruction. Sans tomber dans le culte du mort, il est essentiel que d'autres (ce que tu fais pour ta fille, je crois) perpétuent sa mémoire par des anecdotes de ses qualités et de ses défauts. <br /> Et un jour aussi, il faut que quelqu'un de la famille raconte à l'enfant quand celui-ci en fera la demande, pourquoi et comment cette personne est morte. Les non-dits sont un poison.
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