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A mon prince disparu
A mon prince disparu
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15 décembre 2009

Un dimanche de décembre

Dimanche 13 décembre 2009. La nuit a été horrible,  pleine de cauchemars. Me suis endormie au petit matin.

8h30. « Maman, tu peux me préparer un biberon ? » Oubliée la grasse matinée. Autrefois, c’était toi qu’elle appelait. Je m’occupais d’elle le matin en semaine, le week-end c’était ton tour.

9h53. Nous partons en trombe pour la messe de 10h. Durant l'office, notre puce ne tient pas en place. Difficile de participer et de suivre. J’entends quelques bribes du sermon. Le prêtre parle de la joie du Chrétien, de rayonnement du Christ à communiquer. Comment puis-je communiquer de la joie moi qui ne suis que cendres ?

11h. La messe est finie. Nous retrouvons Monique sur le parvis. Elle me conseille de faire la « prière pour les âmes du purgatoire » à ton attention. « Comme ça, ça va l’aider à partir et à rejoindre Dieu ». Je lui souris sans lui dire que je n’adhère pas à ce genre de croyance. Je ne crois pas que tu erres parmi nous et que tu as besoin de notre aide. Je crois plutôt que c’est nous qui avons besoin de la tienne. J’espère sincèrement que tu es plus heureux que nous.

11h25. Arrivée au cimetière. Il a plu cette semaine. Inutile d’arroser les fleurs sur ta tombe. Jeter les feuilles mortes, c'est tout. Notre puce prononce quelques mots avec un grand sourire : « On t’aime très fort. Tu es dans notre cœur ». Nous repartons aussitôt. Ton corps s’est décomposé dans cette tombe mais toi tu es ailleurs. Nous ne te voyons pas mais je sais que tu repars avec nous.

12h00. Notre puce regarde un DVD, j’accommode les restes de la veille. Rituel du dimanche : nous mangeons dans la salle de séjour et nous prenons un apéritif. Jus de fruit pour elle, boisson alcoolisée pour moi.

13h00. Après le brossage des dents, notre puce a la permission de faire la sieste sur notre lit.

Je commence à faire le ménage. Il n’a pas été fait depuis 3 semaines. Notre appartement n’a jamais été aussi poussiéreux.

Le téléphone sonne deux fois, je ne réponds pas. Pas envie.

15h00. Je n’ai pas fini de nettoyer mais notre puce se réveille. Nous rangeons sa chambre. Je termine seule mais la remercie et l’encourage pour son aide.

16h25. Je réalise que c’est l’heure du goûter. J’arrête le classement de la paperasserie.

17h00. J’arrête le rangement. Je continuerai une autre fois. (Quand ?)

17h30. Nous descendons mettre le papier de l’assurance sur le pare brise de la voiture. Nous en profitons pour mettre quelques babioles à la cave. C'était toi qui le faisais tout cela.

17h45. Je dois donner le bain et tout de suite si je ne veux pas me coucher trop tard.

18h30. Notre puce est propre, coiffée et en pyjama. Nous téléphonons à sa marraine.

19h30. Ma sœur et moi coupons court à notre conversation téléphonique. Il est l’heure de donner à manger aux enfants. Mon beau-frère a déjà commencé à s’en occuper. Moi, il faut que je m’en charge toute seule.

20h00. Comme tous les dimanches depuis des années, je me branche sur France Inter pour écouter Le Masque et la Plume. Notre rituel du dimanche a lieu sans toi depuis quelques semaines. Cela me fait une drôle d’impression.

20h30. Notre puce est dans sa chambre. Nous n’avons pas trouvé son doudou. Je lui en ai proposé d’autres qu’elle a acceptés mais elle a du mal sans le vrai. Elle m’appelle pour un oui pour un non alors que je suis affairée. A un moment, je craque et je hurle à pleins poumons :

- QU’EST-CE QU’IL Y A ?

- Je veux Doudou

- IL EST OU TON DOUDOU ?
- Je sais pas

- BEN, MOI NON PLUS ! ET PUIS TU ME SAOULES A M’APPELER TOUT LE TEMPS. J’EN AI MARRE, TU COMPRENDS ? J’EN AI MARRE DE TOUT ME TAPER TOUTE SEULE ! ALORS TU ME LACHES LES BASKETS PARCE QUE JE SAIS PAS OU IL EST TON DOUDOU ! T’AVAIS QU'A FAIRE ATTENTION ! J’EN AI MARRE ! J’EN PEUX PLUS, J’EN PEUX PLUS !

Même les sourds ont du m’entendre tant j’ai hurlé. Notre puce se met à pleurer à chaudes larmes. Je retourne à la cuisine et pour me donner une contenance, je me mets à ranger. Il y a quelques temps, lorsque l’un d’entre nous était en difficulté avec elle, l’autre intervenait. Aujourd’hui, c’est fini. Elle n’a que trois ans. C’est à moi d’éviter de basculer dans la colère. C’est à moi de gérer. Ce soir, je n’ai pas pu. Je me calme peu à peu. Je m’en veux. Ma pauvre petite ! Je l’entends renifler dans la chambre. Je m’approche et ouvre la porte. Ses yeux sont rouges et son petit bout de nez aussi. J’ouvre mes bras, elle s’y jette. Je lui demande pardon. Je lui explique qu’avant son papa m’aidait et que maintenant je dois tout faire toute seule. Alors parfois je suis très fatiguée et je m’énerve.

- Mais moi aussi, je peux t’aider

- Ma chérie, tu es une petite fille...

- Non, je suis une grande fille !

- Oui, mais tu n’es pas une grande personne…

La conversation dure plusieurs minutes. Nous sommes restées dans les bras l’une de l’autre. Je referme la porte le cœur rempli d’amour pour elle.

Cela fait 3 jours que je culpabilise. Ton absence c’est  tout cela aussi.

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Commentaires
M
Non Reine, vous n'écrivez pas pour rien, beaucoup de personnes malheureuses qui arrivent sur votre blog retrouvent ce qu'elles vivent. La vie n'est pas un long fleuve tranquille même si certaines comme nous souffrent plus cruellement. Continuez à écrire, pour vous mais aussi pour les autres.
T
Je ne sais pas quoi vous répondre si ce n'est que votre message m'a touchée. J'ai besoin de mettre des mots sur ce que je vis. Si les quelques lignes que j'écris peut aider quelqu'un à savoir qu'il n'est pas seul à souffrir, alors je n'écris pas pour rien.
E
toujours une grande émotion à vous lire, sachez que, malgré votre chagrin, votre chemin m'aide à vivre mon propre chemin... et votre faiblesse et c'est paradoxale, me donne de la force... continuez à écrire même s'il vous faut gueuler votre souffrance...
A mon prince disparu
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