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A mon prince disparu
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12 mai 2010

Pour moi

Hier, j'avais posé une journée de congé «rien que pour moi». Je m'étais promis de ne consacrer cette journée qu'à me faire plaisir comme je le faisais de temps en temps quand tu étais parmi nous et comme tu le faisais aussi.

Je me suis levée à l'heure habituelle pour aller déposer notre fille à la garderie du matin. Avant de commencer «ma» journée, je devais quand même passer aux impôts. En octobre dernier, pendant mon arrêt maladie, alors que j'accomplissais toutes les démarches administratives liées à ton décès, j'avais eu une jeune fille des impôts au téléphone qui m'avait donné des informations auxquelles je n'avais strictement rien compris. J'avais pris quelques notes en me promettant de rappeler en début d'année prochaine. C'est ce que j'ai fait à mon retour de vacances de Pâques. Cette fois, j'ai eu un jeune homme clair et précis. Je dois faire deux déclarations de revenu. Une regroupant nos deux salaires jusqu'à la date de ton décès. L'autre regroupant mon salaire de la date de ta mort jusqu'à la fin de l'année. Notre centre des impôts se trouve dans une ville limitrophe de la nôtre. Par miracle, j'ai trouvé le bon bus qui me dépose au centre tout de suite. Nous vivons dans une ville cossue mais celle où je me suis rendue, j'avoue qu'elle est d'un standing au-dessus. Un peu désabusée, j'ai regardé les belles villas à travers la vitre du bus. J'ai revu ton cercueil descendant dans la fosse et me suis demandée si toutes ces propriétaires avaient conscience qu'elles partiraient et n'emporteraient rien avec elles. Par contre la vue des arbres et des plantes m'a fait du bien. Que de belles couleurs! Du rose ou du mauve apparaissaient ça et là entre du vert. Merci à la nature de nous offrir sa beauté. Merci à l'Homme de penser qu'un peu de verdure peut faire du bien. Cette sensation apaisante a été un peu atténuée. En descendant du bus, j'ai aperçu une affiche portant les lettres FN au-dessus du drapeau national. Une phrase violente m'a frappée au cœur. «Non à l'islamisation de la France. Les jeunes avec X». J'ai pensé à Nounou et à tout le réconfort qu'elle m'apporte depuis que tu es parti. De quelle couleur es-tu dans le monde où tu es? De quelle religion? Nounou avec le bien qu'elle prodigue spontanément autour d'elle a t-elle moins de valeur que toi? Est-ce qu'enfin nous devenons tous égaux après la mort?

J'ai pris le numéro que l'on m'a donné à l'accueil et suis allée m'asseoir dans la salle d'attente. A peine assise, une dame est venue me chercher. Je pensais passer ma matinée aux impôts, je n'y suis pas restée plus de 10 minutes. Qu'allais-je faire? Je n'avais rien prévu pour le matin. J'ai décidé d'amener notre housse de canapé au pressing. Fidji nous a fait un super cadeau : un énorme pipi bien odorant! Grrrr!!! La dame du pressing était écœurée, au bord de la nausée. J'ai faillit m'excuser de ne pas lui amener des vêtements propres et parfumés.

De retour à la maison. Je me suis demandée ce que j'allais faire pour «ma»journée. D'habitude, mes plaisirs étaient simples : cinéma et boutiques. Hier, je n'en avais aucune envie. Qu'est-ce qui pourrait me faire plaisir? J'ai cherché, j'ai cherché, j'ai cherché longtemps et n'ai rien trouvé. Mais alors vraiment envie de rien. Je suis allée faire des courses en me disant qu'en sortant j'aurais certainement envie de faire quelque chose. Rien. J'ai rangé mes courses en écoutant en podcast l'émission de Guy Gilbert que je n'avais pas écouté pendant les vacances de Pâques.

J'ai appelé l'entreprise de Pompes Funèbres pour savoir ce qu'il en était de la pierre tombale que j'avais choisie. La jeune femme m'a gentiment rappelée que je n'avais pas passer commande pour une pierre tombale et que c'est pour cela que rien n'avait été fait. Je ne le savais pas. Ton décès m'a été annoncé le 14 septembre. J'étais aux pompes funêbres, entourée de tes parents, de ta sœur Gaétane et de mes parents, le 15 septembre. J'étais dans un état indescriptible. Je n'ai aucun souvenir de ce que j'ai pu raconter. La facture que j'ai sous les yeux atteste que la dame a raison. Je n'ai pas passé de commande pour une pierre tombale.

J'ai téléphoné à la Caisse d'Épargne pour les frais de garde que je paie pour ton compte «je ne sais quoi». Résultat, il faut que je prenne contact avec ma banque pour savoir s'il vaut mieux que ton compte reste où il est ou si je le transfère chez notre banque. A voir plus tard...

J'ai réussi à m'empêcher de faire le ménage et après le déjeuner, j'ai regardé deux épisodes de Desperate Housewife. Que faire pour que cette journée soit ma journée?

 

J'ai pensé au chocolat que j'avais acheté le matin même. J'ai mangé toute la tablette en me demandant quelle serait ma vie si je ne travaillais pas. Je me suis rendue compte que sans que je le sache, mon travail m'aidait aussi à rester debout. Je suis ensuite allée chercher notre puce chez Nounou. L'essai était terminé.

Voilà comment j'ai passé cette journée que je voulais pour moi. Il n y a pas de «pour moi» si tu n'es plus là. Je n'arrive plus à trouver de plaisir dans cette vie. Cela fait des mois que je le répète et le rabâche, je suis morte moi aussi.

 

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Commentaires
M
Pour vous quelques mois,pour moi bientôt quatre ans que la vie n'est plus plaisir.<br /> Alors on se rattache à son travail, à la beauté d'un paysage, aux couleurs de la nature, aux difficultés des gens,à des petits riens qui occupent le temps et font avancer...<br /> Concentrez-vous sur votre fille, Reine, viendra le moment où vous aurez envie de penser à nouveau à vous.<br /> Courage
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