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A mon prince disparu
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19 octobre 2010

Rester stoïque

Depuis quelques jours ma directrice m'ignore. Je lui dis bonjour et elle ne me répond pas. Alors qu'auparavant, je me serais fait du mal en me demandant quelle faute j'aurais pu commettre, j'ai été persuadée depuis le début que son comportement n'avait rien à voir avec moi. Je l'ai vu hier dans le bureau des secrétaires. Je lui ai dit bonjour. Elle m'a regardé mais comme je m'y attendais, elle ne m'a pas répondu . Quelques minutes plus tard, je l'ai revue près de l'ascenseur. J'ai réitéré mon salut. Elle m'a répondu faiblement. Ses traits étaient tirés et ses yeux inexpressifs. «Pas trop fatiguée?» , «Un petit peu mais faut faire avec.»

Aujourd'hui, à l'heure du déjeuner, j'ai parlé de mes observations à Simone et Jennifer, deux des secrétaires. Oui, c'est normal, m'ont-elles dit. Elle a appris que le fils de ses meilleurs amis est mort brutalement. Une crise cardiaque. Il avait 26 ans et aucun problème de santé. Tu te rends compte une crise cardiaque à son âge! (L'image de ta mère est passée devant moi. Puis celle de ton cercueil, de tes parents pleurant face à lui...) Jennifer a alors enchaîné sur la mort récente de son médecin traitant qu'elle a apprise en lisant le mot accroché sur la porte de son cabinet. Tandis qu'à l'autre bout de la table nos autres collègues éclataient de rire sous leurs blagues salaces, nous avons parlé toutes les trois de la mort. Ça peut arriver à n'importe qui. On oublie que ça peut arriver demain, ce soir, tout à l'heure...

Le frère de Simone est mort de la maladie de Charcot. Très affectée, Simone en a fait de l'eczéma. Elle raconte que le jour de l'enterrement, une de ses connaissances lui a dit «Toi au moins tu t'y attendais». Elle faisait référence à son fils qui s'était suicidée quelques années plus tôt. Et bien tu vois, cette femme, je ne veux plus la voir me dit Simone. Je la regarde et repense à ton amie qui m'a dit en guise de consolation, 4 jours après ton enterrement, «Tu peux aussi rencontrer quelqu'un d'autre» . Je n'en parle pas à mes collègues bien sûr. Je me contente de lui dire que parfois les gens ne se rendent pas compte à quel point leurs paroles peuvent être violentes.

Petit à petit, la conversation a glissé vers autre chose. Je ne sais pas comment je fais pour rester stoïque à chaque fois. Mécanisme de défense sans doute.

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