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A mon prince disparu
A mon prince disparu
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3 janvier 2010

Nouvelle année

1er janvier 2010. Je me décide à aller me coucher à 4h30. Je dois être raisonnable, j'ai la responsabilité d'une petite fille de 3 ans.

Lever à 10h00. Je suis assommée mais le devoir passe avant tout. Miracle? Notre puce décide de ranger sa chambre. Et elle le fait ! Certes le rangement est très personnel mais plus rien ne traîne par terre. Sa chambre semble s'être agrandie.

14h30. Nous avons fini de déjeuner des restes de la veille. Les dents sont brossées. Je couche notre puce pour sa sieste. Bien que je sois prête à m'écrouler, il vaut mieux que je ne m'endorme pas. Je risque de ne pas me réveiller avant des heures même si je programme le réveil.

15h15. Notre puce dort dans notre chambre depuis bientôt 1 heure. Elle s'est couchée tard hier soir mais si je veux qu'elle dorme ce soir, je dois la réveiller vers 16h00.

15h25. J'entends un bruit étrange dans notre chambre. (Tiens, elle est déjà réveillée? Elle joue avec un jouet. On dirait un bruit de camion qu'elle fait rouler par terre. De camion? Elle n'en a pas et encore moins dans notre chambre. Je vais voir on ne sait jamais)

Vision d'horreur. Notre puce a les yeux grands ouverts et fixes. Un gros tas de bave sort de sa bouche et a déjà fait une tâche immense sur mon oreiller. Le bruit que j'entends et que j'ai pris pour le bruit d'un jouet provient en fait de sa respiration. Notre fille est en train d'agoniser. Je la prends dans mes bras. Ses yeux restent fixes. Je lui tapote les joues. Aucune réaction. Je crie son prénom, je le hurle, je l'expulse de ma poitrine, de mes tripes. REVEILLE TOI ! Pas de réaction. Son corps est complètement amorphe, hypotonique. Soudain, une évidence se fait en moi. Elle est morte. Dieu t'a enlevé à moi, il me prend aussi ma fille, mon bébé, la chair de ma chair. Il me punit car j'ai voulu mourir. NOOOON!

15h30 (?) J'appelle les pompiers. «Vous avez demandé la police, ne quittez pas». Je raccroche. J'ai fait le 17 au lieu du 18.  Je recommence. Le jeune homme au téléphone est calme. Il me pose des questions sur l'état de notre puce. Je le coupe.

- Vous pouvez venir tout de suite?

- Une voiture est déjà partie, madame. Je vous pose des questions pour connaître l'état de votre enfant.

- (Je sens que mon cœur sort de ma poitrine.) «Je crois que mon coeur va s'arrêter.»

- Mais non madame, tout va bien se passer. Je vais vous passer à une personne de votre quartier.

Musique d'attente. Je hurle dans la pièce «POURQUOI, MON DIEU? POURQUOI?»

- Allo, madame?

C'est une jeune fille. Elle a du m'entendre hurler. Je réponds à ses questions et elle tente de me rassurer. Je regarde notre fille, elle semble revenir à elle. Ses yeux se sont fermés. Son corps a repris de la tonicité. Le râle s'est arrêté. Elle respire normalement et semble dormir.

Je suis par la fenêtre, notre fille dans les bras. Les pompiers arrivent. Une autre voiture aussi. (Tiens les flics sont là aussi. J'ai appelé 5 secondes, j'ai raccroché et ils ramènent leur cul! Dommage qu'ils ne l'aient pas bougé pour toi. Ils doivent avoir des instructions pour se bouger un 1er de l'an!) Des échanges ont lieu entre eux et les pompiers. Ces derniers sont certainement en train de leur expliquer qu'une mère affolée s'est trompée de numéro. Les super héros s'en vont sans demander leurs restes.

Les pompiers sont au nombre de trois. Très sympathiques et habitués à intervenir auprès d'enfants. Ils me demandent le prénom de notre puce et lui parle avec une voix et des mots très doux. Elle grogne, mécontente d'être dérangée dans son sommeil. «C'est bon signe» me disent-ils. Pourtant, je vois bien qu'ils se lancent des regards pleins de sous-entendu, que chacun à leur tour, ils refont les mêmes gestes pour vérifier qu'ils ont les mêmes chiffres sur leur appareil. L'un d'eux appelle le SAMU. «On va l'emmener à l'hôpital de P... Euh, c'est juste pour être plus sûr». Je ne m'inquiète plus. Notre puce n'est pas en train de me quitter car les pompiers n'auraient pas l'air si tranquilles.

Nous passons la nuit à l'hôpital. Le diagnostic est tombé : certainement une crise convulsive, à vérifier. Dans ce service de pédiatrie, tout a été pensé pour que le séjour des enfants se passent au mieux. Leur prénom est inscrit sur la porte de leur chambre, de manière à ce que chaque personne qui s'y présente donne l'impression de connaître chaque enfant. Par contre pour les parents, c'est une autre histoire. Pas de repas. L'hôpital étant isolé, pas moyen de sortir pour s'acheter quelque chose. On m'indique un distributeur «au 1er étage après la première allée sur la droite, puis à gauche, ensuite vous remontez l'escalier et c'est tout droit. Mais je vous préviens, y'a que des cochonneries. Vous pourrez toujours manger dans l'assiette de votre fille. En général, c'est ce que font les parents». Je regarde ce qui pourrait me servir de repas : des Bounty, des Mars, ou des bonbons multicolores. Je renonce. Je ferai comme les autres parents. J'ai quand même droit à un lit de camp que je dois replier à 9h30 demain matin. C'est écrit sur les instructions affichées sur le mur.

Tandis que notre puce mange, je réprime un soupir. Tout à l'heure, je me suis inquiétée de notre retour auprès de l'infirmière qui auscultait notre fille.

- On est venu avec les pompiers, on n'a donc pas de voiture. Comment ça se passe dans ces cas là?

- Je sais pas...Vous avez pas un mari?
- Si, j'en ai un, mais il est mort

- Ah, désolée. Ben, je sais pas...

Je ferme les yeux. La pression est retombée mais j'ai besoin de ta présence. Maintenant, à l'instant même où je n'ai plus peur, j'ai besoin de toi. Je voudrais pouvoir poser ma tête sur ton épaule et que tes bras se referment sur moi. Je suis seule maintenant. Seule pour affronter tout cela.

J'ai pensé à prendre mon portable. J'appelle ta famille...et la mienne aussi.

2 janvier 2010. C'est mon père, mon ancien bourreau, qui vient nous chercher. Il a passé la nuit dernière en soirée avec ses copains. Il est tout excité. Il est 11h30. Je meurs de faim. Notre puce a eu droit à un biberon et à une compote. Je n'ai rien pu piocher dans son repas cette fois. Grand Seigneur, mon père nous emmène dans un grand restaurant.

15h00. De retour à la maison. Ma douche m'a fait du bien. Ma puce est couchée dans notre chambre pour sa sieste. Je reste l'oreille dressée. Je vais rappeler l'hôpital la semaine prochaine. Je dois prendre des RDV pour une IRM et un EEG. Tandis que je sirote ma tasse de thé, je regarde la porte de notre chambre. Je lève ma tasse pour un toast. «Je crois que nous sommes les bienvenues en 2010, ma puce».

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Commentaires
M
je vous en prie, il faut lutter pour survivre et pour votre fille.<br /> <br /> Madame, je suis avec vous. Prenez, s'il le faut, une heure à la fois.<br /> <br /> Surtout, surtout, ne cessez pas d'écrire. Rattachez-vous à votre enfant.<br /> <br /> Je vous embrasse jeune maman.
C
C'est terrible !Et j'espère que tout ira bien par la suite? Tu dois être forte pour elle, bon courage.<br /> <br /> Amitiés
A mon prince disparu
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