Deux tourtereaux

Après le cours de danse de notre puce, nous sommes allées toutes les deux faire quelques courses. Comme notre puce rechignait à y aller, elle a eu le droit de choisir les yaourts qu'elle voulait. Tu n'aurais sans doute pas été d'accord mais la relation que nous avons toutes les deux serait sans doute différente si tu étais là. Quoiqu'il en soit, il a fallu que je la stoppe pour qu'elle ne dévalise pas le magasin. Entre les petits suisses, les yaourts, gâteaux de riz, et fromages blancs, nous avons de quoi tenir pour quelques semaines.

Comme nous rentrions, j'ai entendu des klaxons provenant de la rue derrière nous. Samedi, soleil, klaxons. Avant même de voir de quoi il s'agissait, j'ai dit à notre puce, «Attend ma chérie, c'est un mariage. On va regarder.» A peine avais-je fini de parler que le cortège est apparu. Je ne m'étais pas trompée. Spontanément notre fille m'a imitée. Un grand sourire aux lèvres, nous avons fait de grands signes de la main aux mariés et à leurs invités. Cela a redoublé leur joie. Ils se sont mis à klaxonner de plus belle. Une jeune fille a sorti la moitié de son corps d'une des voitures et a hurlé « Vive les mariés! » et tandis que notre puce et moi répétions en chœur la même chose, elle nous a filmé avec son portable. Il s'agissait d'une famille maghrébine. Ils étaient beaux dans leurs vêtements et leur joie les rendait encore plus beaux. Arrivés au rond-point, ils se sont mis à pousser des cris (des youyous?» et tournaient, tournaient, en rond. Des commerçant sont sortis de leur boutique pour les regarder. Toute cette joie était très communicative. Je n'ai pas vu comment cela a commencé mais une altercation a opposé le conducteur d'une des voitures du cortège avec un autre chauffeur qui tentait désespérément de s'engager dans le rond-point. Heureusement cela n'a pas duré.

Bien entendu, je nous ai revu tous les deux à la place de ces deux tourtereaux. Le soleil brillait aussi pour nous ce jour là et nous aussi nous étions beaux dans nos atours. Je me suis souvenue de notre cortège, de nos invités, de notre engagement à la mairie puis à l'église, le vin d'honneur, le repas, la pièce montée, les photos, notre DJ complètement barjo...C'est ce jour là que pour la première fois de ma vie, bien avant la naissance de notre fille, j'ai connu le bonheur le plus total. Ce jour-là et les jours qui ont suivi, j'ai marché sur un nuage, j'ai touché le ciel du doigt. Quand la dernière voiture a disparu, j'ai souhaité aux tourtereaux tout le bonheur du monde.